Jésus prêchant au bord du lac de Thibériade. James Tissot (1836-1902) |
Saint Matthieu 14,13-21
Jésus partit en barque pour un endroit désert, à l’écart.Les foules l’apprirent et, quittant leurs villes, elles suivirent à pied. En débarquant, il vit une grande foule de gens ; il fut saisi de pitié envers eux et guérit les infirmes.
Le soir venu, les disciples s’approchèrent et lui dirent : « L’endroit est désert et il se fait tard. Renvoie donc la foule : qu’ils aillent dans les villages s’acheter à manger ! »
Mais Jésus leur dit : « Ils n’ont pas besoin de s’en aller. Donnez-leur vous-mêmes à manger. »
Alors ils lui disent : « Nous n’avons là que cinq pains et deux poissons. »
Jésus dit : « Apportez-les moi ici. »
Puis, ordonnant à la foule de s’asseoir sur l’herbe, il prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction ; il rompit les pains, il les donna aux disciples, et les disciples les donnèrent à la foule.
Tous mangèrent à leur faim et, des morceaux qui restaient, on ramassa douze paniers pleins. Ceux qui avaient mangé étaient environ cinq mille, sans compter les femmes et les enfants.
« Nous mangeons notre Dieu. Quel admirable et ineffable amour il a fallu, pour inventer cette merveille ! Cet amour dépasse tous les sens, et cet amour devrait blesser le cœur de tous les hommes, tellement il est au-dessus de tout, l'amour de Jésus pour nous.
Or, il n'y a point de chose matérielle qui soit aussi proche et aussi intime à l'homme que le boire et le manger reçus dans la bouche de l'homme, et c'est précisément pour cela, c'est pour s'unir à nous de la façon la plus proche et la plus intime, qu'il a trouvé ce merveilleux procédé. [...]
De même que la nourriture corporelle est transformée en notre chair, de même celui qui mange dignement l'adorable nourriture est changé en elle. C'est ainsi que Notre Seigneur a pu dire à saint Augustin : "Ce n'est pas moi qui suis changé en toi, c'est toi qui est changé en moi."
Cette nourriture s'en va, par les artères, jusqu'au fond intime de celui qui la reçoit dignement. Prenons la parole de saint Bernard : "Quand nous mangeons la nourriture corporelle, nous la mâchons tout d'abord, et ensuite elle descend doucement dans le corps."
Qu'est-ce donc que cette mastication ? Saint Bernard le dit : "Quand nous mangeons Dieu, c'est nous qui sommes mangés par Lui, Il nous mange." »
Bx Jean Tauler (1300-1361), Sermon XXX (3), Le Cerf, Coll. Sagesses, Paris, 1991.
Avec Maitre Eckhart et Henrich Suso, Jean Tauler fut l'un des maitres de la mystique rhénane.
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